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Entretien. Romain Valadier-Picard « Cette médaille est synonyme de progression, de beaucoup de travail »

Le 13 juin dernier, le judoka Romain Valadier-Picard devenait vice-champion du monde au terme d’une journée quasi parfaite. Un peu plus d’un mois après cette première médaille mondiale, le sociétaire de l’Athletic Club de Boulogne-Billancourt de 22 ans est revenu sur cette journée, affichant de belles ambitions pour la suite.

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Plus d’un mois s’est écoulé depuis ce championnat du monde et cette médaille d’argent. Avec le recul, que retiens-tu de cette journée ?


Évidemment, après cette finale, il y a eu un peu de frustration et de déception, j’avais entrevu la possibilité d’être champion du monde et d’avoir mon portrait à l’INSEP. Et puis ne pas réussir à franchir ce cap et finir ma journée sur une défaite, forcément, c’est toujours un peu difficile. Après, avec le recul, je suis content, c’est ma première médaille mondiale, c’est quand même le début de quelque chose et c’est une belle récompense de tout le travail que j’ai fait ces dernières années, donc c’est génial. Ce que je retiens de cette journée, c’est de la progression, que le travail paie, que tout ce que j’ai mis en place ces dernières années commence à porter ses fruits. C’est aussi une belle récompense, car je me suis blessé quatre mois avant et j’ai dû vraiment travailler pour arriver à ce niveau-là. Cette médaille est synonyme de progression, de beaucoup de travail, d’un step de passé.


Comment as-tu abordé cette journée ?


J’ai abordé cette journée avec envie, l’envie d’aller chercher cette médaille. Mais ce n’était pas de la surconfiance, car ça m’a déjà joué des tours ; c’était plus de la confiance en le travail que j’avais fait et en mes capacités à aller chercher une médaille. Ça fait deux ans que je pense avoir le niveau d’être médaillé mondial, même si ça ne s’était pas concrétisé. Malheureusement, je fais septième l’année dernière. Mais je sentais que je n’étais pas loin et que ça allait venir. Donc j’avais vraiment la dalle pour aller décrocher cette première médaille chez les grands.


Sur l’aspect judo, est-ce que tu as le sentiment d’avoir passé un cap ?


En termes de judo, je me suis amélioré. J’ai amélioré mes ashi waza, j’ai un judo plus patient, je fais moins de fausses attaques, j’arrive à mieux enchaîner les liaisons debout-sol. J’ai aussi senti une progression sur le plan mental, j’arrivais bien à démarrer mes matchs, j’étais bien dans ma compétition et je me sentais bien.


Comment est-ce que tu avais entamé cette première finale mondiale ?


J’avais l’impression d’être bien rentré dans mon match, à l’image de cette journée, j’avais vraiment la dalle. En plus, pour moi, c’était la finale de rêve, contre Nagayama qui est pour moi le meilleur judoka du monde, c’était vraiment pour moi le boss final du jeu. Donc réussir à vaincre Nagyama, ça aurait vraiment été une magnifique récompense du travail que j’ai fait et une belle finalité. Je suis bien entré dans mon combat, mais malheureusement, à un moment, je fais une erreur et c’est un très bon judoka, donc il a profité de ce mauvais déplacement et il me met ce wazari. Et puis, une fois mené, j’essaie de rattraper mon retard, mais ça n’a pas suffi.


Comment est-ce que tu fais pour gérer la pression à l’approche de grands événements comme des championnats du monde ?


Je pense que maintenant, c’est devenu une habitude. Évidemment, on a la pression, cette envie de bien faire et la peur de perdre. Mais je commence à bien maîtriser cette espèce de stress de la compétition et j’arrive à l’utiliser pour me surpasser. Au fur et à mesure de la journée, j’étais de plus en plus dans le judo, je sentais la pression diminuer progressivement.


En demi, tu confirmes ta place parmi les meilleurs mondiaux, puisque tu arrives à battre le Russe Ayub Bliev, qui est aujourd’hui numéro deux mondial. Qu’est-ce qu’il te manque pour faire tomber des judokas comme Ryuju Nagayama ?


J’avais déjà battu Bliev une première fois, donc j’avais les clés pour le battre. Je suis parvenu à neutraliser son judo une nouvelle fois. Mais pour battre Nagyama, il faut que j’arrive à continuer à mettre l’agressivité que j’avais en début de match. En fait aujourd’hui, avec un judo traditionnel (manche revers) je n’avais pas forcément moyen de le faire tomber ou en tout cas avec mon judo. Je pense qu’il me manque encore des Ashi-waza, de l’agressivité, mais aussi une autre façon de faire du judo. Parce que Nagayama c’est un très bon judoka classique et quand il est au Japon, il ne prend que des judoka qui font un judo classique comme moi, donc c’est important de développer d’autres choses pour battre les Japonais, je pense par exemple à du corps-à-corps et à des façons d’agresser qui ne sont pas traditionnelles. Ou alors, il faut que je devienne encore meilleur que lui sur le judo classique. Je pense que les deux solutions sont possibles car je suis un bosseur et je vais travailler pour l’une comme pour l’autre.


Tu n’as que 22 ans, tu fais partie de cette nouvelle génération prometteuse. Quelles sont tes ambitions ? J’imagine que tu as les Jeux dans un coin de ta tête.


Avec les gars (Kenny Liveze, Maxime Nagyap Hambou, Joan-Benjamin Gaba, Arnaud Aregba, Maxime Gobert), on fait partie d’une génération qu’on appelle les forces spéciales. Et je pense que pour la suite, on a moyen de marquer l’histoire du judo français et d’être tous ensemble aux Jeux de Los Angeles. Donc, comment j’envisage mon avenir sportif ? Je dirai d’abord avec plusieurs médailles mondiales, dans les années qui viennent. Il faut que je sois champion du monde et évidemment champion d’Europe. Et bien sûr, un jour, champion olympique. C’est l’objectif en tout cas, et je me donnerai les moyens de l’accomplir et je bosserai à la hauteur de mes ambitions. Ce sont des objectifs communs avec tous mes camarades des FS.


En France, la catégorie des -60 est une catégorie très dense. Avec cette médaille mondiale, tu prends un peu d’avance pour les Jeux de LA 2028 ; j’imagine que c’est un soulagement ?


Oui, évidemment, la catégorie des moins de 60 kg est super dense : il y a Luka Mkheidze, il y a moi, Enzo Jean, Cédric Revol. Donc oui, il y a vraiment beaucoup, beaucoup de monde. Donc oui, après, j’ai pris un peu d’avance, mais en réalité j’ai peut-être simplement rattrapé Luka. Il est double médaillé olympique, et une médaille olympique, ça marque, même si une médaille mondiale, c’est bien aussi. Après, je ne suis pas champion du monde, donc je n’ai pas non plus pris une avance très importante. Il y a quand même un soulagement, puisque, avec cette médaille, je garantis ma place pour l’année prochaine. Mais une Olympiade, c’est long, presque trois ans, il peut se passer beaucoup de choses, donc je ne considère pas que j’ai pris de l’avance, mais je considère que c’est une étape dans ma progression et que ça confirme que le travail que je fais paie.


Quels sont tes objectifs d’ici aux Jeux ?


Les Jeux Olympiques sont dans longtemps, donc si je réfléchis à cet objectif-là avant de penser aux étapes qui sont nécessaires pour y arriver, je ne ferai jamais les Jeux. Je dois d’abord être champion d’Europe, champion du monde. Mon objectif, c’est clairement d’être trois fois médaillé aux Europes et aux Mondes et d’arriver à Los Angeles en étant préparé et en forme. Mais encore une fois, les jeux sont dans longtemps, donc il va falloir être bon dans les années qui viennent.


Quelles seront tes prochaines échéances ?


Je ne sais pas encore, je pense que je reprendrai sûrement sur le Grand Prix de Zagreb en Croatie. Mais je n’ai pas encore fixé les dates. Après, j’aimerais bien faire le Grand Slam de Tokyo en décembre. Mais on va mettre tout ça au clair pendant le stage au Japon avec les coachs.

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