Des mois d’interrogation, et enfin une officialisation :
Certains l’attendaient et l’espéraient depuis des mois, d’autres la craignaient et ne voulaient pas y croire. Peu importe les avis, depuis ce mercredi 30 novembre 2021 à midi, c’est en tout cas officiel. Éric Zemmour est candidat à l’élection présidentielle de 2022.
Le journaliste et écrivain français de 63 ans a patienté longtemps avant d’officialiser cette décision. Interrogé à plusieurs reprises sur la question, il avait constamment temporisé, laissant planer le doute. Même si de nombreux indices ne trompaient pas, comme la sortie de son livre La France n’a pas dit son dernier mot, ses multiples apparitions dans les médias et le soutien grandissant à son égard dans les sondages, le candidat n’a rien voulu laisser fuiter. Malgré tout, il avait laissé entendre lors d’une interview que s’il devait faire une annonce, il choisirait bien la façon et le moment pour la faire. Ce moment est arrivé, et le moyen a surpris.
Sur les coups de midi ce mardi 30 novembre, la France a été fixée. Par le biais d’une vidéo YouTube de 10 minutes, le chroniqueur Zemmour devenait le candidat Zemmour. Sur un fond de musique classique, devant une bibliothèque, fiches de discours en main et micro placé devant sa tête, il entame son discours comme le Général De Gaule l’avait fait depuis les studios de la radio de la BBC, à Londres, lors de l’appel du 18 juin 1940. Il s’adresse alors à tous ses « compatriotes », en affirmant qu’il a conscience du sentiment qui les étreint « depuis des années ».
Durant une première minute, il décrit alors des dizaines d’actions du quotidien. Il parle d’activités que les français pratiquent, de lieux qu’ils fréquentent. Dans le même temps, des images de violences diverses sont montrées, mais aussi une campagne publicitaire pour la diversité, ou encore le soutien de joueurs de football au mouvement Black Lives Matter. Il conclut en disant que les français n’ont plus le sentiment d’être dans le pays qu’ils connaissent.
Il évoque alors ce qui semble être le bon vieux temps pour lui, illustrant son propos par des images d’archives notamment. On l’entend ensuite vanter les mérites d’une France passée, ainsi que les figures emblématiques de notre nation : Jeanne d’arc, Bonaparte, le Général De Gaule, Victor Hugo, Descartes, Notre Dame de Paris et les clochers en France, Versailles, Pasteur, Rousseau, Brigitte Bardot, Aznavour … Il cite ce qui incarne pour lui la grandeur de la France. Cette apologie de la France, Monsieur Zemmour pense savoir que les français la regrette, qu’il ne la retrouve plus. En bon patriote, il affirme partager leur nostalgie. Pour montrer sa compréhension, le candidat déclare des français qu’ils sont comme « des exilés de l’intérieur ».
Éric Zemmour défend alors ceux qui partagent cette idée. Comme s’il les réconfortait, celui qui est considéré par beaucoup comme un chroniqueur polémiste a défendu l’idée que ces français n’étaient pas seuls. Que ces français avaient raison, et que tous ceux qui se liaient pour dire le contraire ne faisaient que mentir. Il dénonce la pensée des politiques, des journalistes, des universitaires et de tous les bien-pensants.
Après avoir affirmé qu’il avait compris ces français, c’est alors que réellement, le candidat Zemmour se mit à exprimer ses idées politiques. Il déclare tout d’abord que la civilisation française est en train de disparaitre, mais aussi que l’immigration aggrave nos problèmes. La tiers-mondisation est aussi à l’origine de l’appauvrissement de notre pays pour lui. L’homme de 63 ans exprime ainsi ce qui pourrait être des solutions d’après lui : réindustrialisation, rééquilibre de la balance commerciale, réduction de la dette, récupérer les entreprises françaises qui ont déménagé, plus de travail pour les chômeurs. Comment parvenir à tout cela concrètement ? Pas de proposition du candidat dans sa vidéo.
Il défend alors le retour d’une école républicaine basée sur le mérite, sans « expérience égalitariste ». Il veut aussi une plus grande souveraineté française, celle-ci même qui a été perdue au profit d’une « Europe qui ne sera jamais une nation » d’après ses dires. La France se doit également de reprendre le pouvoir aux minorités militantes pour Zemmour.
Tout cela est la faute de la gauche et de la droite, qui auraient menti depuis tant d’années. Monsieur Zemmour dénonce les hommes et femmes politiques tous autant qu’ils sont, sans oublier évidemment le Président de la République, Emmanuel Macron. Il se déclare alors être le seul lucide sur la situation réelle du pays. Lui qui ne voulait pas faire de politique – malgré deux tentatives pour intégrer ENA durant ses études – s’est comme senti obligé de par la gravité de la situation à l’entendre. Là où les autres voudraient réformer la nation, lui souhaite la sauver.
Il appelle alors aux votes des français, pour pérenniser la civilisation française, avec des « filles sans voiles » et des « garçons non soumis ». Il veut que les immigrés « s’assimilent » et ainsi, recréé un peuple français soudé selon sa perception.
Pour cela, le candidat Zemmour appelle donc à voter pour lui, qui redonnera ses lettres de noblesse à la patrie. Il conclut en disant « Vive la république, et surtout, Vive la France ».
La candidature de Monsieur Zemmour est donc lancée, et à peine publiée, la vidéo a énormément fait parler.
Une vidéo, et déjà une polémique :
En effet, si les sympathisants d’Éric Zemmour se félicitent de cette vidéo selon eux bien montée et convaincante, ce ne fut pas le cas de tout le monde. L’après-midi même, soit quelques heures après sa publication, la vidéo était déjà dénoncée et critiquée par de nombreux médias.
Le problème principal de cette vidéo : les droits d’auteurs. Durant dix minutes, de nombreuses images de journalistes, de cinéastes, de chaines de télévision défilent. Le fait est que l’équipe de communication de Monsieur Zemmour a utilisé toutes ces bandes vidéo et ces bandes sons, sans en demander le droit d’utilisation aux personnes concernées.
Yann Barthès, qui apparait dans la vidéo d’Éric Zemmour pour dénoncer la pensée de certains journalistes, n’a en effet pas donné son accord pour que son image soit employée par le candidat. Lui et son équipe du programme télévisé « Quotidien » ont ainsi évalué le montant des droits d’auteurs qu’il aurait fallu payer pour utiliser tous ces extraits dans la vidéo. La somme avoisinerait les 100 000 euros. Mais n’ayant pas payé cela, Éric Zemmour s’est exposé à des poursuites judiciaires, qui risquent de lui coûter bien plus cher.
Alors que l’ancien chroniqueur de CNEWS est au cœur de certaines procédures judiciaires, il risque de ne pas en sortir de sitôt. Lui qui a été relaxé à de nombreuses reprises, mais aussi condamné en 2011 pour provocation à la discrimination raciale et en 2018 pour provocation à la haine envers les musulmans, a déjà reçu plusieurs messages de futures poursuites judiciaires sur les réseaux sociaux. Alors qu’il vient d’être condamné une troisième fois récemment, le polémiste français n’en a pas fini avec la justice. Certains cherchent même à répondre au candidat, comme la production de « Quotidien » qui a affirmé que l’argent remporté au procès ira directement à une association qui vient en aide aux migrants (lire aussi sur ce sujet : Procès d’Éric Zemmour sur les migrants mineurs isolés).
Ainsi, le candidat français de 63 ans est à nouveau au cœur d’une importante polémique. Alors que beaucoup affirme qu’il ne fait cela que pour le « buzz », il semble en tout cas déterminé dans sa candidature. Éric Zemmour défend ses idées coute que coute, et emploie n’importe quel moyen pour cela, quitte à se retrouver au cœur de procédures judiciaires.
Même si ses idées sont souvent jugées par certains de racistes, de misogynes ou encore d’islamophobes, Éric Zemmour croit en son projet et est soutenu par un important électorat. Dans les sondages, il est aujourd’hui à environ 14% des intentions de vote. Malgré tout, une importante partie de la population s’oppose à lui avec ferveur. Une chose est sûre, il n’y a pas de demi-mesure concernant le candidat, et qu’on l’apprécie ou pas, il sera intéressant de le voir s’exprimer face à d’importantes pointures de ce monde politique. Affaire à suivre …
