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Le journal pour les jeunes, par les  jeunes

Le Kirghizistan : Jeune démocratie d’Asie centrale menacée

Louis Brand

Louis Brand

Étudiant à Sciences Po Paris - campus franco allemand de Nancy. Particulièrement intéressé par les relations internationales et les questions relatives à la sécurité/défense à l'échelle européenne notamment.
Le dimanche 11 avril, les électeurs du Kirghizistan ont approuvé avec une large majorité la réforme constitutionnelle étendant les pouvoirs du Président actuel Sadyr Japarov.

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photo Sadyr Japarov
Sadyr Japarov

Approuvée à 79%, la réforme constitutionnelle n’a cependant pas beaucoup mobilisé, avec seulement 37% de participation, soit juste assez pour que le référendum soit validé (en deçà de 30%, la Constitution prévoit l’invalidation du référendum). La participation politique n’est pas une tradition au Kirghizistan, à l’image des 43,6% d’abstention aux présidentielles de 2017. 

Ceci illustre assez bien la difficile affirmation des principes démocratiques dans ce petit pays montagneux d’Asie centrale. Ancien satellite soviétique dont l’économie est essentiellement tournée vers l’agriculture, le Kirghizistan tente tant bien que mal d’assurer le pluralisme politique depuis les soubresauts de 2005 et 2010. 

La démocratie kirghize peine à trouver de bases solides 

Aboutissement de la « révolution des tulipes » de 2005 et de la révolution kirghize de 2010, la jeune démocratie kirghize est gangrénée par la corruption et les instabilités politiques. Si le Kirghizistan est souvent apparu comme l’exception démocratique dans une Asie centrale autoritaire, il semble que la réforme constitutionnelle renverse la tendance. 

À la jonction entre la Chine et la Russie, la démocratie Kirghize est très dépendante de ces deux partenaires. Vladimir Poutine avait ainsi annoncé espérer renforcer les relations bilatérales entre Moscou et Bichkek. L’Asie centrale est un terrain où le Président russe aime poser ses pions, faisant résonner les échos de l’ancienne URSS. 

Une réforme élargissant les pouvoirs présidentiels 

La réforme constitutionnelle va dans le sens d’une présidentialisation du régime, avec la suppression du mandat unique et une réduction des pouvoirs du Parlement. Sadyr Japarov s’ouvre donc les droits d’effectuer deux mandats de 5 ans, tout en réduisant le nombre de députés de 120 à 90. Le mandat unique était l’héritage des révoltes de 2010 et était depuis garanti par la Constitution. Sa suppression ne fait que souligner le renforcement de l’autorité présidentielle. Ce changement de feuille de route fait passer la République Parlementaire kirghize à un régime présidentiel, au sein duquel la fonction de Premier Ministre est supprimée. 

Qui est Sadyr Japarov ? 

Populiste de 52 ans et élu Président de la République Kirghize en janvier 2021, Japarov est une figure du parti nationaliste Mekenchil (« Patriote »). Arrivé au pouvoir dans un contexte politique tendu suite à la démission de l’ancien Président Sooronbay Jeenbekov, Sadyr Japarov est un homme politique polarisant au Kirghizistan. En effet, désigné Premier Ministre par intérim en octobre dernier alors qu’il purgeait sa peine de onze ans de prison et libéré par ses partisans, Japarov n’est pas vu d’un très bon œil par une partie de la classe politique. 

Un virage autoritaire pour un redressement économique à venir

Sur fond de nationalisme tendant vers le populisme, la campagne de Sadyr Japarov s’axe sur le redressement économique du pays. Ayant annoncé vouloir « nettoyer les bureaucrates et les officiels corrompus »afin de sortir de l’instabilité politique systémique au Kirghizistan. 

Avocat d’une politique de réduction de la dette, dont 40% est constituée de prêts envers la Chine, Japarov veut « mettre fin à une gouvernance chaotique », selon ses termes. Il s’agit aussi de rapatrier les deux millions de travailleurs kirghizes émigrés à l’étranger, notamment en Russie, dont les transferts d’argent assurent près de 30% du PIB. 

Finalement Sadyr Japarov s’est donné les moyens de sa politique, en augmentant les pouvoirs présidentiels, permettant une politique économique dirigiste. Ce revirement politique est vu d’un œil inquiet par la Commission de Venise du Conseil de l’Europe, qui a déploré le manque de « consultations publiques significatives et inclusives et de débat au Parlement ». Certains observateurs évoquent même un pas vers la dictature, alors que deux des opposants politiques de Japarov ont été arrêtés après l’arrivée au pouvoir du nationaliste. 

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