Pénurie d’eau, malnutrition, exode, extinction d’espèces, montée du niveau des océans, telles sont les perspectives d’avenir des générations futures signalées par les scientifiques du GIEC. Selon eux, la vie sur terre ne sera pas la même quand les enfants nés en 2021 auront 30 ans.
Entre discours apocalyptique et lueur d’espoir, le projet de rapport du GIEC tire la sonnette d’alarme envers les politiques. Bien plus alarmiste que celui de 2014, le projet de rapport rappelle que le destin de l’humanité dépend de mesures immédiates et drastiques. Prévu pour février 2022, le rapport final sera malheureusement publié après les cruciales réunions internationales sur le climat et la biodiversité prévues fin 2021.
Les accords de Paris pas assez ambitieux
En signant les accords de Paris sur le climat en 2015, la communauté internationale s’est engagée à limiter le réchauffement en-deçà de 2 degrés par rapport aux niveaux préindustriels. Aujourd’hui, le rapport du GIEC considère qu’un dépassement de 1,5 degrés pourrait déjà entrainer « des conséquences graves, pendant des siècles, et parfois irréversibles ». Or, la hausse des températures moyennes par rapport au milieu du XIXème siècle a déjà atteint les 1,1 degré. Selon l’Organisation météorologique mondiale, le risque que ce seuil soit dépassé dès 2025 est de 40%.
« La vie sur terre peut se remettre d’un changement climatique majeur en évoluant vers de nouvelles espèces et en créant de nouveaux écosystèmes. L’humanité ne le peut pas ».
Extrait du projet de rapport du GIEC
L’ironie du sort est que ce sont les moins à blâmer qui souffriront le plus rapidement du réchauffement climatique. Les récifs coralliens et les territoires de l’Arctique figurent parmi les premières victimes. À titre d’exemple, le pôle Nord se réchauffe trois fois plus vite que la moyenne. En juillet 2019, la base canadienne d’Alert qui est le point habité le plus septentrional de la planète a battu son record de température avec 21 degrés enregistré.
Une crise climatique qui se transforme en crise sociale majeure
Tous les pays ne sont pas pareillement armés pour faire face aux enjeux climatiques. Et ce sont souvent les moins armés qui en font le plus. À titre d’exemple, l’AOSIS (Alliance of Small Island States) a fait pression lors des accords de Paris pour limiter l’élévation des températures non pas à 2 mais à 1,5 degrés. Or, l’AOSIS regroupe 44 pays insulaires et côtiers qui émettent à eux seuls même pas 0,2% des émissions carbones.
Ceci illustre une triste vérité qui est que ce sont les plus petits émetteurs qui sont aussi les plus exposés, et les plus engagés. Or à une crise globale, on apporte des solutions globales. La division de la communauté internationale vis-à-vis des enjeux climatiques est un frein à cette nécessité d’unité.
Effectivement, certains pays se refusent à croire en l’urgence climatique. Le retrait des États-Unis des accords de Paris durant le mandat de Donald Trump en est un parfait exemple. Une catastrophe quand on sait que les États-Unis rejettent à eux seuls 15% des émissions carbones dans le monde.
L’inertie de certains pays occidentaux face à l’urgence climatique repose sur le fait qu’ils ne se sentent pas directement concernés ou qu’ils ne veulent pas mettre le système économique en péril. Effectivement, les premiers touchés seront les petits pays insulaires, moins intégrés à la mondialisation. Mais l’élévation du niveau des océans entrainera des vagues de migrations importantes, dont les flux convergeront vers des pays plus développés. Serrons-nous alors en mesure de gérer des flux toujours plus nombreux ?
« How dare you! You have stolen my dreams and my childhood with your empty words – and yet, I’m one of the lucky ones”
Greta Thunberg au Climate Action Summit de l’ONU
À cela peut s’ajouter le risque de famine à très grande échelle dû aux pertes dans le système de production alimentaire. Même si certains vantent la capacité d’adaptation de l’espèce humaine, les dommages collatéraux sont trop élevés pour être ignorés. Selon le rapport du GIEC, jusqu’à 80 millions de personnes de plus auront faim d’ici 2050 et 130 millions pourrait tomber dans l’extrême pauvreté.
C’est cet effet boule de neige qui est particulièrement inquiétant selon les scientifiques du GIEC. Nicholas Stern, spécialiste de l’économie du climat commente : « La monde fait face à des défis entremêlés complexes. À moins de les affronter en même temps, nous n’allons en relever aucun».
La nécessité de concilier lutte pour le climat et lutte pour la biodiversité
Pour la première fois en décembre 2020, des experts sélectionnés par le GIEC se sont rassemblés virtuellement avec des experts de l’IPBES (plate-forme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques). Une aberration quand on connaît les co-bénéfices que peuvent apporter une collaboration entre lutte pour le climat et lutte pour la biodiversité. Trop souvent, ces deux problématiques sont appréhendées séparément par la recherche et les politiques publiques. La collaboration entre les deux organismes a permis d’échanger et confronter les connaissances scientifiques pour parvenir à des solutions plus globales.
Selon Sandra Lavorel, écologue et membre de l’IPBES : « L’idée était de pousser à une lutte conjointe pour maximiser les co-bénéfices pour le climat, la biodiversité mais aussi la société. Il n’y a pas de solution magique ni pour le climat, ni pour la biodiversité, ni pour les deux. La résolution de ces crises repose sur un mélange complexe d’actions, dépendant du contexte local».
Ces mots résonnent particulièrement bien en période électorale. Si la lutte pour le climat se fait à toutes les échelles, elle a d’autant plus de sens à l’échelle locale. Il faut s’émanciper de cette croyance que seules les organisations intergouvernementales sont compétentes en la matière. Il faut que les actes surpassent la simple conscience.