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Le journal pour les jeunes, par les  jeunes

Réouverture des cinémas : vers un colossal « embouteillage » ?

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Alexandre Manevy

Directeur du pôle culture chez CSactu.
Fermés depuis maintenant six longs mois, les cinémas préparent une possible réouverture. Du moins, professionnels comme amateurs passionnés l’espèrent. Mais après une période de clôture qui a tant traîné en longueur, le monde du Septième Art en France craint une grande bousculade de longs-métrages. Entre choc de rencontres impossibles entre blockbusters et films indépendants et contraintes sanitaires, la réouverture des cinémas, qui se fait grandement languir, inquiète cependant le milieu cinématographique.

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Embouteillage et nouveaux modes de diffusion

À l’image de scènes d’embouteillages monstres issues de films comme le Huit et Demi de Fellini ou le La La Land de Damien Chazelle, un véritable « bouchon » de métrages est à prévoir pour la réouverture des cinémas. En effet, les films prêts à être présentés au public s’accumulent dangereusement chez les distributeurs, leur nombre s’élevant désormais à plus de 400 d’après la déléguée générale de la Fédération nationale des éditeurs de films, Hélène Herschel. 

Ainsi, nombre de sociétés de distribution craignent une forte concurrence lors de la sortie simultanée de leurs nombreux films en attente, comme Le Pacte par exemple, célèbre distributeur français dont une vingtaine de pellicules sont encore dans l’expectative d’une sortie prochaine. 

Mais ces dates de sortie restent toujours plus qu’incertaines, et nombre de films ont été forcés de reporter voire d’annuler leur diffusion en salles depuis le début de la crise sanitaire. 

Certains distributeurs ont fait le choix de vendre leurs films à des plateformes telles que Netflix ou Amazon (parmi les plus connues). C’est ainsi que des films français comme Madame Claude ou le très attendu Comment je suis devenu super-héros, réalisé par Douglas Attal, ont été rachetés par le géant numérique américain. (Voir aussi : Réécrire le futur du cinéma).

D’autres ont préféré aux plateformes le pari de sortir leurs métrages en « direct to VOD » et en DVD, comme l’a été par exemple récemment Wonder Woman 1984, second volet de la saga à gros budget de Patti Jenkins qui ne sortira pas en salles en France. 

Enfin, la plupart des films prévus restent dans une sorte d’entre-deux, à l’image de Godzilla vs Kong. En effet, le film de la Warner sortira en France uniquement en achat digital, sous réserve d’une possible sortie dans les salles dès que cela sera rendu possible. 

Une incertitude de la part des distributeurs et de nombreuses solutions prises qui ne sont pas forcément bénéfiques pour le cinéma. 

Les risques d’un « trop-plein » de films à l’affiche 

Un tel afflux de sorties digitales ou directement en support physique prive les distributeurs de présenter leurs films dans des salles de cinéma. Or le Centre National du Cinéma et de l’Image Animée (CNC), pilier du soutien dans la création de films français, s’alloue une part des recettes générées par les tickets vendus en salles afin de redistribuer cet argent dans la production de métrages nationaux. Ainsi, lorsqu’un blockbuster américain, prédestiné à attirer souvent des millions de spectateurs, évite la case des salles obscures, c’est autant de recettes qui ne sauront être perçues et réinjectées dans l’industrie par le CNC, accentuant sa stagnation. 

En ce qui concerne l’embouteillage craint à la réouverture, « la pression va être très forte » estime Hélène Herschel. Celle-ci relativise cependant en précisant que l’afflux de films à présenter au public attendu ne représente que 20% de plus en comparaison de 2019, année considérée comme étant la dernière « normale » pour le cinéma. 

Mais quels sont les risques à craindre d’une telle avalanche de métrages ? 

Tout d’abord, l’inévitable trust des blockbusters américains risque de nuire au cinéma plus indépendant. Déjà, en temps normal, les films dits « d’auteur » peinent bien souvent plus à trouver leur public que les grosses productions. Avec des sorties trop nombreuses et simultanées (il est possible que 50 à 60 films sortent chaque semaine à la réouverture, contre 14 en temps normal), certains producteurs et distributeurs craignent que leurs longs-métrages à plus petits budgets se fassent totalement écraser par la concurrence. 

Néanmoins, bien que la question préoccupe fortement les professionnels, des mesures pourraient être prises pour pallier à cela, comme l’espère le président du CNC Dominique Boutonnat en indiquant qu’ « il est fondamental que chaque œuvre puisse rencontrer son public ». 

L’autre gros risque d’un tel embouteillage est la rotation forte des films qui seront présentés dès la réouverture. Ainsi, des métrages qui resteront moins longtemps à l’affiche au profit d’autres jouiront d’une visibilité moins importante, ce qui amènera irrémédiablement à moins de séances, moins d’entrées et moins de recettes. 

https://images.app.goo.gl/F1auWG25qzKa3ZBe7
Mobilisations et solutions prévues 

Malgré tous ces risques, les professionnels se mobilisent afin de « limiter la casse » et espèrent passer outre les dangers d’un embouteillage filmique. 

A ainsi été saisie l’Autorité de la concurrence, qui a tenté de proposer la mise en place de dispositifs pour faciliter la réouverture. Celle-ci préconise alors la création d’un calendrier concerté des sorties entre tous les distributeurs, afin qu’aucun n’empiète trop sur un autre. 

De ce fait les sorties seraient échelonnées dans le temps, après concertation des équipes, afin que tous leurs films soient mis sur un pied d’égalité. Et si l’Autorité de la concurrence a reconnu qu’une telle pratique est réputée interdite car contraire à la libre concurrence, elle reconnaît également que la crise sanitaire force cela et que la concurrence se fera d’une autre manière qu’avec seulement la date de sortie (nombre d’établissements de diffusion, durée de mise à l’affiche des longs-métrages…). 

De plus, certaines grosses productions ont vu leur sortie largement reportée, leurs distributeurs craignant cet embouteillage et préférant une certaine exclusivité. C’est le cas du prochain James Bond, prévu initialement pour le 8 avril 2020 et qui a vu sa sortie repoussée de nombreuses fois avant d’être fixée au 6 octobre 2021. Le renommé réalisateur Denis Villeneuve et son nouveau film Dune, extrêmement attendu par les cinéphiles, a écopé d’une sortie repoussée au 15 septembre 2021 contre une sortie initiale en décembre 2020. Enfin, la troisième (més)aventure d’OSS 117, prévue pour le début d’année 2021, sortira finalement en août. 
Ainsi, nombre de blockbusters, de par des dates de sorties grandement repoussées, ne feront pas obstruction dans l’embouteillage de la réouverture des salles, laissant donc ses chances au cinéma plus indépendant. 

Les distributeurs pourront également profiter d’une ressortie de leurs films ayant été diffusés sur grand écran peu avant la fermeture d’octobre. Des films comme Adieu les Cons d’Albert Dupontel ou ADN, le dernier film de Maïwenn, n’ayant été que quelques jours à l’affiche, disposeront d’une second chance pour trouver leur public. Se faisant, le CNC espère qu’aucun film ayant été prévu pour sortir à quelque moment que ce soit ne se verra lésé en comparaison d’un autre. 

Enfin, la situation est à relativiser cependant. Grâce aux aides allouées au cinéma, le CNC a recensé en 2020 une baisse de « seulement » 20,6% dans la production des films français sur l’année. 

Ainsi, les tournages peuvent continuer et, malgré une fréquentation moins importante des salles ou l’avènement d’un embouteillage, l’engouement autour du cinéma ne faiblit pas, tout comme le nombre de films à sortir sur nos écrans. 

Source de l’image mise en avant : https://www.google.com/search?q=cinéma%20fermé&tbm=isch&tbs=isz:l&client=opera&hs=6K0&hl=fr&sa=X&ved=0CAEQpwVqFwoTCPCbg9T4j_ACFQAAAAAdAAAAABAC&biw=1311&bih=627#imgrc=T9UX0FMyb8xl-M

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