Après plus de dix ans dans le peloton professionnel, Romain Bardet a officialisé sa retraite. Double podium sur le Tour de France, vainqueur d’étapes en montagne, l’Auvergnat tire sa révérence en laissant une empreinte forte dans le cyclisme français. Derrière lui ? Une génération dorée, affamée, talentueuse. Lenny Martinez grimpe déjà plus vite que son ombre, Paul Seixas apprend vite. Et dans les vallons ou les sprints serrés, Romain Grégoire et Paul Magnier frappent à la porte des grands. Un passage de témoin s’opère : Bardet s’en va, mais la France du cyclisme prépare déjà ses prochaines victoires.
Le dernier coup de pédale d’une légende
Romain Bardet a mis un terme à sa carrière à l’issue du Critérium du Dauphiné 2025, une course qu’il affectionne particulièrement pour son parcours exigeant et ses passages près de ses terres auvergnates. À 34 ans, le grimpeur tourne une page importante du cyclisme français, après plus d’une décennie passée au plus haut niveau.
Professionnel depuis 2012, Bardet s’est rapidement imposé parmi les meilleurs grimpeurs du peloton. Son style offensif et ses qualités en montagne lui ont permis de décrocher deux podiums sur le Tour de France (2ème en 2016, 3ème en 2017), ainsi que plusieurs victoires d’étapes. Il s’est également illustré sur des classiques exigeantes comme Liège-Bastogne-Liège ou les Strade Bianche.
Pour son dernier tour de piste, il a disputé avec émotion ce Critérium du Dauphiné qu’il connaît par cœur. Le public et le peloton ont salué l’un des coureurs français les plus marquants de ces quinze dernières années. Sans jamais tricher, Bardet a cherché à remporter une dernière victoire avec détermination, concluant sa carrière avec ce qu’il a toujours incarné : constance, engagement, et respect.
S’il n’a jamais remporté de grand Tour, Bardet laisse une empreinte forte. Par sa régularité, son éthique et son attachement à un cyclisme sincère, il a su fédérer au-delà des résultats. Son départ marque la fin d’une génération : celle des grimpeurs français formés dans la rigueur, qui ont porté les espoirs tricolores dans les années 2010.
Les petits grimpeurs deviendront grands
Si Romain Bardet quitte le peloton, il ne laisse pas le cyclisme français orphelin. Une nouvelle vague de grimpeurs français est déjà en train de s’affirmer, portée par des profils jeunes, talentueux, et bien formés. Parmi eux, deux noms émergent avec clarté : Lenny Martinez et Paul Seixas.
Lenny Martinez, 21 ans, est sans doute l’un des visages les plus prometteurs du cyclisme français. Formé au sein de la Groupama-FDJ et désormais lieutenant de luxe au sein de la Bahrein Victorious, il s’est révélé très tôt grâce à ses qualités de pur grimpeur. En 2023, il explose aux yeux du grand public en devenant le plus jeune français à porter le maillot rouge de leader sur la Vuelta, à seulement 20 ans. Sur ce même Tour d’Espagne, il s’accroche dans les étapes de montagne et termine 24ème au général, un résultat impressionnant pour une première participation. En 2024, il confirme son potentiel en remportant plusieurs victoires d’étapes sur le circuit World Tour. En 2025, Lenny remporte des étapes sur des tours majeurs tels que sur Paris Nice, le tour de romandie et la dernière étape du critérium du dauphiné.
De son côté, Paul Seixas, 18 ans, évolue au sein de l’équipe Décathlon AG2R La Mondiale. Moins exposé que Lenny Martinez, il progresse régulièrement sur les épreuves U23. En 2024, il s’est classé 3e du Tour de Savoie Mont-Blanc, une course réputée pour ses parcours montagneux exigeants. Cette même année, Paul Seixas devient champion du monde junior sur la redoutable épreuve du contre la montre. En 2025, Paul est attendu comme la pépite des grimpeurs français et c‘est sur le critérium du Dauphiné qu’il explose aux yeux du grand public pour s’offrir une 8ème place au classement général, avec un plateau relevé digne du prochain tour de France.
Si le passage définitif chez les professionnels reste un cap à franchir, ces deux grimpeurs incarnent l’espoir de voir, à moyen terme, un coureur français à nouveau jouer les premiers rôles sur les étapes de montagne du Tour et pourquoi pas devenir le premier Français a porter le maillot jaune de leader sur les champs Elysées et remporter le Tour de France, depuis Bernard Hinault en 1985 . Dans un cyclisme où la précocité est devenue une norme, ils devront continuer à se développer sans brûler les étapes, mais le talent indiscutablement présent.
Un réservoir explosif pour les classiques et les sprints
Si la montagne reste un terrain d’expression fort pour les coureurs français, la nouvelle génération tricolore ne se limite pas seulement au sommet. Ces dernières saisons, de jeunes profils polyvalents émergent sur les terrains vallonnés, les classiques et même les sprints. Romain Grégoire et Paul Magnier en sont deux exemples marquants, à la croisée des coureurs complets, entre punch et vitesse.
Romain Grégoire, 22 ans, a déjà un palmarès solide pour son âge. Révélé chez les juniors puis en espoirs avec des titres nationaux et un titre aux championnats d’Europe en junior, il confirme dès ses débuts chez les pros avec la Groupama-FDJ. En 2023, il remporte le Tour du Limousin, les quatres jours de Dunkerque et surtout une 8ème place sur les Strade Bianche, face à une opposition WorldTour. Grégoire est un puncheur complet, capable de faire la différence sur des arrivées en côte, mais aussi de jouer placé sur les classiques vallonnées. En 2024, il signe plusieurs top 10 sur les classiques, confirmant sa progression sur les courses d’un jour de haut niveau.
De son côté, Paul Magnier, 21 ans, formé Trinity cycling puis Soudal Quick-Step, affiche déjà de belles promesses dans un registre plus explosif. En 2024, il surprend dès le début de saison en remportant une étape du Tour d’Oman, devançant des sprinteurs confirmés, puis réitère dans la foulée en remportant 3 des 6 étapes du Tour de Grande- Bretagne. Rapide, puissant, mais aussi capable de passer les bosses, il s’inscrit dans le profil moderne des sprinteurs polyvalents capables de briller sur les classiques Flandriennes ou les étapes piégeuses de grands tours. En 2025, il remporte 3 classiques d’affilées en moins de deux semaines, dont la dernière en battant Jasper Philipsen au sprint. Son intégration dans une structure aussi exigeante que Soudal-Quick Step témoigne de son potentiel à l’international.
À travers ces deux coureurs, c’est une France du cyclisme en mutation qui s’exprime : plus offensive, plus tactique, et mieux préparée pour briller sur tous les terrains. Si Bardet et ses contemporains ont redonné espoir en montagne, la nouvelle vague tricolore semble armée pour faire bien plus que résister, mais pour gagner sur tous les terrains.
La fin de carrière de Romain Bardet n’est pas un point final, mais bien une virgule dans l’histoire du cyclisme français. Car derrière les noms déjà en lumière comme Martinez, Seixas, Grégoire ou Magnier, la relève continue de pousser avec ambition. Dans les pelotons, Kévin Vauquelin, mais aussi Jordan Jegat, Emilien Jeannière et Paul Penhoët confirment leur montée en puissance. Des coureurs comme Ewen Costiou, ou Axel Laurence, font preuve d’une régularité qui inspire confiance. Que dire de Clément Berthet, ou de profils comme Enzo Paleni ou Bastien Tronchon ? Le réservoir est large, les profils sont variés. Des grimpeurs comme Alex Baudin, des puncheurs comme Mathis Le Berre, Louis Barré, et des finisseurs comme Emilien Jeannière, ou encore Mathys Rondel forment une base solide.
Tous n’émergeront pas en même temps, ni au même niveau. Mais ce qui frappe, c’est la densité du vivier, l’accompagnement structuré, et une ambition qui dépasse le cadre national. Le départ de Bardet est peut-être une fin d’époque, mais certainement pas la fin des ambitions tricolores. La relève est là. Elle grimpe, elle sprinte, elle apprend. Et elle n’a pas fini de vous surprendre.