En 2023, le malaise psychologique ne se cache plus : 16 % des Français présentent des signes de dépression et 23 % d’anxiété, selon Santé publique France. La santé mentale au travail est donc un vrai défi. Cette détresse freine la performance collective et pèse 23 milliards d’euros sur l’Assurance maladie, soit 13 340 € par salarié pour les entreprises. Pourtant, des solutions existent : hotlines anonymes, plateforme Moka.care, formations managériales à l’écoute active… Mobiliser ces leviers, c’est préserver notre capital cérébral et transformer la prévention en investissement rentable plutôt qu’en coût subi.
Un enjeu de santé publique et de performance économique
Chaque matin, des milliers de salariés rejoignent leur travail avec l’envie d’être efficaces, mais sont aussi inquiets, un mal-être difficile à cacher. En 2023, selon Santé publique France, 16 % des Français montraient des signes de dépression. 23 % souffraient d’anxiété. 10 % avaient déjà eu des pensées suicidaires. Fatigue importante, nuits agitées, manque de concentration et de confiance s’installent alors dans les open-space. Cela ralentit les projets et fragilise les liens d’équipe. La santé mentale n’est plus un sujet privé : elle concerne tout le monde. L’État a d’ailleurs décrété que pour 2025, la santé mentale serait la « grande cause nationale ». En effet, l’équilibre psychologique des salariés est crucial, non seulement dans l’intérêt de leur bien-être mais également pour la performance des entreprises et, au final, pour la solidité de l’économie.
Un coût astronomique
La facture de l’inaction s’élève à plusieurs dizaines de milliards chaque année. Les troubles psychiques constituent 23 milliards d’euros de remboursements pour l’Assurance maladie, faisant de ce poste la première dépense de santé. Ailleurs, la perte de PIB applicable à la détresse mentale est estimée à 92 milliards. Les entreprises, quant à elles, supportent un « ticket moyen » de 13 340 € par salarié et par an, qui englobe absentéisme, turnover et baisse de productivité. Ces chiffres montrent aussi une tendance lourde : entre 2019 et 2024, le taux d’absentéisme a bondi de 41%. En 2023, 15 % des arrêts maladie l’étaient pour motifs psychologiques, ce taux atteint 22 % pour les arrêts longs et les troubles musculo-squelettiques (16 %) sont en deuxième position. Derrière ces statistiques, ce sont des projets retardés, des clients insatisfaits et surtout, des collaborateurs qui souffrent.
Des actions encore insuffisantes
Il existe une séparation entre la demande des salariés et les mesures proposées. On a moins d’un collaborateur sur quatre qui bénéficie d’un plan complet de prévention (diagnostic, ateliers, suivi). Et un sur trois ne sait même pas que ces dispositifs existent. Cependant, 63 % souhaiteraient suivre des formations pour mieux gérer leur stress, et 61 % se disent prêts à répondre à des enquêtes internes sur leur bien-être. Ces projets ont malgré cela du mal à se mettre en place car peu de moyens et par crainte d’être en difficulté.
Dès lors qu’une entreprise met en place au moins deux actions de prévention, 68 % des salariés voient une vraie amélioration de leur santé mentale. Ce taux s’élève à 83 % lorsque l’organisation adopte une stratégie globale. Aussi, l’engagement grimpe de 40 % et l’énergie au travail de 60 %, des points importants pour fidéliser les talents et maintenir la performance.
Des dispositifs qui se professionnalisent
Un service d’assistance psychologique 24 h/24 et 7 j/7 reste un réflexe : AXA France, pionnier depuis quinze ans dans le domaine, enregistre 3 % d’appelants parmi ses effectifs chaque année, avec dix consultations psychologues gratuites. Mais les réponses s’élargissent. BlaBlaCar finance trois séances individuelles, L’Oréal quatre pour ses 15 000 salariés. Parallèlement, la start-up Moka.care, lancée fin 2019, a transformé le marché : 300 entreprises clientes dans 17 pays, 200 praticiens partenaires, et une application offrant micro-formations (podcasts, vidéos, exercices) et un module Teams (« Félix ») de quatre minutes hebdomadaires. Selon ses fondateurs, l’outil a réduit de 34 % le risque de burn-out. Les RH disposent désormais de tableaux de bord pour adapter en temps réel leurs actions de prévention.
Former et accompagner les managers
Le manager est le premier rempart ou, parfois, le premier obstacle. L’OMS préconise de les former à détecter les « signaux faibles » — yeux rouges, désengagement, irritabilité — et à pratiquer l’écoute active. Sur Moka.care, un module guide le responsable pas à pas : « Que faire si un collaborateur pleure ? », « Comment réagir face à une colère soudaine ? » Ces formations permettent de remplacer le réflexe de l’autorité par celui de la bienveillance structurée. Un manager rassuré sur ses propres compétences psychologiques devient un catalyseur de résilience pour son équipe, capable de prévenir l’escalade vers l’épuisement professionnel.
De nouvelles menaces
Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) alerte sur l’émergence de trois risques : la violence des vagues de chaleur – facteurs de perte de concentration et de fatigue accrue –, le télétravail intégral – jugé préjudiciable au sentiment d’appartenance et à la frontière vie pro-vie perso –, et l’intelligence artificielle, vectrice de surcharge cognitive, d’isolement algorithmique et de « lean » management. Les travailleurs indépendants (chauffeurs VTC, livreurs) sont également exposés à des conditions de travail stressantes sans filet de prévention. Leur santé mentale, jusqu’ici mal sondée, nécessite des études et des actions dédiées.
Les micro-agressions au travail
Ces petits commentaires — « Toujours en retard, j’imagine que c’est ta vie de famille », « Toujours dispo pour rire… » — sont loin d’être anodins. Ifop pour Paritalité révèle que 82 % des salariés en ont été témoins et 47 % en ont été victimes (27 % liés à l’apparence, 25 % à l’âge, 22 % à la santé, 14 % au genre). 60 % des victimes jugent leur engagement et leur sentiment d’appartenance affectés. Pourtant, seuls 40 % des témoins recadrent l’auteur, et 35 % tendent la main à la victime. Faute de sécurité psychologique instaurée par la hiérarchie, ces actes donnent lieu à un climat de défiance et de désengagement.