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Politique Zéro Covid : la gronde des rues chinoises

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Mathis Lyko

En parallèle de mes études en Relations Internationales à l'Université de Genève, je fais partie de l'équipe politique au sein de CS Actu.
Fin novembre, après une nouvelle annonce d’un durcissement de la politique contre le Covid, des manifestations ont éclatées dans plusieurs villes chinoises. C’est la première fois depuis les incidents de Tian An Men que le Parti Communiste Chinois est vivement remis en cause. Tout comme son dirigeant autoritaire, Xi Jinping.

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Illustration d'une manifestation chinoise - © Anthony WALLACE / AFP
Illustration d'une manifestation chinoise - © Anthony WALLACE / AFP
Une première depuis Tian An Men

Le gouvernement de Xi Jinping est pour la première fois remis en cause dans les rues. Les scènes de manifestations capturées par les caméras du monde entier rappellent évidemment les évènements de Tian An Men en 1989.

Pour rappel, un vent de liberté souffle sur la Chine en cette fin des années 90. Résolument contre la corruption, dénonçant le manque de liberté d’expression et revendiquant des réformes politiques et sociales, le mouvement prend rapidement de l’ampleur. Porté par des étudiants en tête de ligne, les Chinois s’opposent frontalement au régime en place. Les manifestations aboutissent à Pékin avec des grèves de la fin organisées sur la Place Tian An Men. Seule une répression forte de l’Etat chinois permet l’arrêt des manifestations. Une répression par le sang allant d’une centaine de victimes à 10 000 selon les sources.

Des centaines de milliers de Chinois rassemblés Place Tiananmen à Pekin le 2 juin 1989

Bien que les nouvelles générations n’aient pas connu les évènements de Tian An Men, son vestige règne dans le mouvement de revendication actuel.

Plus encore, la tentative par le gouvernement d’effacer toutes les erreurs du passé, notamment les répressions des manifestations semble avoir créé une génération qui ne craint pas de se confronter aux autorités.

Au départ, une politique Zéro Covid remise en cause

Le gouvernement décide fin novembre de durcir une nouvelle fois la politique en matière de Covid. Une nouvelle fois car depuis deux ans les Chinois vivent au rythme des revirements gouvernementaux.

HECTOR RETAMAL/AFP

Si au départ, cette politique menée d’une main de fer par Xi Jinping est une réussite, des failles apparaissent rapidement. En cause le refus d’importer des vaccins occidentaux, contraignant une partie de la population à ne pas se faire vacciner.  Alors que d’autres pays comme la Nouvelle-Zélande ont décidé de s’éloigner d’une politique très restrictive, Xi Jinping lui n’en démord pas. Plus les mois avancent, plus la politique se veut ferme. Télétravail, fermeture des écoles ou encore confinement total sont alors de mises. Plus encore, les sanctions en cas de non-respect se veulent toujours plus répressives. Arrestations dans les rues pour non-port du masque, confinements total … la population est à bout.

Il y a un mois donc, une nouvelle salve de règles voit le jour. La raison ? Une augmentation significative du nombre de cas de Covid. Au total, 30 000 cas sont enregistrés sur les dernières semaines.

Si c’est bien cette politique qui est contestée, les manifestations ont débutées de manière atypique. En effet, c’est à la suite d’un incendie dans une résidence de la ville d’Urumqi (Xinjiang) que les chinois sont descendus dans la rue. Au moins 10 personnes ont péri dans le feu. Pour une partie de la population, le confinement stricte a empêché certaines victimes de sortir de chez eux, au détriment de leur vie.  

Cela à mis le feu aux poudres dans plusieurs grandes villes. Depuis, la gronde a conquit la plupart des grandes villes du pays. De Pékin à Canton, les manifestants montrent frontalement leur mécontentement face au régime et sa politique Zéro Covid, en place depuis 2 ans.

Des revendications plus nombreuses

Si au départ seule la politique Zéro Covid est pointée du doigt, c’est tout le système étatique chinois qui est remis en cause. En effet, les manifestants défilent aux sons des « Xi Jinping démission ». Alors que celui-ci a été reconduit pour un troisième mandat en novembre, une partie de sa population ne semble plus vouloir de son chef d’Etat. Parmi les revendications, on demande plus de libertés politiques et on dénonce la censure exercée par le gouvernement. Une censure qui s’est fortement accentuée dans les premiers mois de la pandémie.

Ces manifestations inédites accouchent également d’un nouveau mouvement. Celui des « feuilles blanches ». Sa marque de fabrique, une simple feuille de papier, sans inscription, brandi haut par les manifestants. Le geste est double. Il est évidemment une manière de dénoncer la censure du gouvernement. Mais il représente également un pied de nez à une probable répression par le régime. En effet, pour quels motifs arrêter des manifestants qui ne revendiquent rien en apparence ?

Des manifestants tenant des feuilles blanches en signe de protestation contre la censure liée au coronavirus / REUTERS
La réaction du gouvernement

Un temps attendue, la réponse du gouvernement fut rapide. Si la répression n’atteint pas les niveaux de celle de 1989, la police joue tout de même son rôle. En effet, la commission des affaires juridiques et politiques du parti communiste chinois a estimée à l’issu d’une réunion qu’il était “nécessaire de réprimer les activités d’infiltration et de sabotage des forces hostiles conformément à la loi”. Si ce rapport ne cite pas directement les manifestants, il semble peu probable qu’un autre cas soit évoqué ici.

Dès lors, les arrestations se sont multipliées. Bien que le droit de manifester soit inscrit dans la constitution chinoise (article 35), les manifestants s’exposent à de gros risques. Les meneurs encourent jusqu’à 10 ans de prison selon les spécialistes. Malgré les risques, des affrontements ont déjà eu lieu dans certaines villes comme à Canton. De violents heurts ont éclatés dans la nuit du 29 au 30 novembre.

Alors, la pression populaire va-t-elle faire plier le gouvernement ?

Vers une sortie de la politique zéro covid ?

Les manifestations commencent à porter leurs fruits. En effet, Pékin a écouté sa population et amorce un ralentissement des mesures drastiques. Dès le 11 novembre, le gouvernement publie une série de vingt mesures visant à cibler au mieux les restrictions. Parmi ces mesures, une interdiction de confinements trop large ou encore l’impossibilité de fermer les écoles de manière préventive.

En début de semaine dernière, le gouvernement a mis un peu plus l’accent sur une possible sortie de la politique Zéro Covid. Symboliquement, la tour Canton (plus haute tour de la ville) a été habillée jeudi de l’inscription « chaque personne est individuellement la première responsable de sa santé. ».

Ce même jeudi, le gouvernement central a annoncé l’entrée dans une « nouvelle phase » de la politique contre le coronavirus. Depuis, plusieurs villes ont lâché du lest sur les règles. De nombreux magasins ont rouverts à Pékin, Canton. De même pour les transports en commun, que les habitants peuvent désormais emprunter sans montrer de test PCR négatif de moins de 48h.

Les manifestations de 2022 auront-elles le même destin que celles de 89 ? Après une semaine, leurs routes semble diverger. Ouvrant potentiellement la voie, à terme, à une fin de la politique Zéro Covid.

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