“À l’approche du sommet sur le climat de la COP 29 qui se tiendra dedans quelques jours à Bakou, les États doivent faire pression sur les autorités azerbaïdjanaises pour qu’elles changent de cap et cessent de réprimer la société civile, libèrent les personnes détenues uniquement pour avoir exercé sans violence leur droit à la liberté d’expression, et garantissent que les participant, militant et journalistes, notamment, pourront s’engager librement et pleinement dans cet événement”, a déclaré Amnesty International le 8 octobre 2024.
Dès l’annonce du pays hôte, en décembre dernier, l’ONG Amnesty International, a lancé une vaste enquête pour dévoiler les violentes répressions de l’Azerbaïdjan vis-à-vis des défenseurs des droits humains, des journalistes et des militants écologistes et politiques. Sa crainte : que les détracteurs qui cherchent à faire entendre leurs opinions pendant la COP29 ne s’exposent à de graves représailles lorsque le pays ne sera plus sous les feux des projecteurs.
Des activistes qui dérangent …
Pour l’Azerbaïdjan, les activistes mettent en avant les insuffisances du gouvernement et refusent de le laisser disposer sans entraves ni contrôle des ressources naturelles. Effectivement, le gouvernement azéri est connu pour avoir une longue histoire de répression de la société civile, ainsi qu’une forte tradition climaticide.
Selon des militants azerbaïdjanais des droits humains, environ 300 personnes sont incarcérées pour des raisons politiques. C’est le cas du défenseur des droits humains et de l’action climatique Anar Mammadli. Il est placé en détention provisoire depuis le 30 avril 2024. La raison : de fausses accusations de complot en vue d’introduire illégalement des devises étrangères dans le pays. Même constat pour l’économiste et militant politique azerbaïdjanais Gubad Ibadoghlu. Il a été placé en résidence surveillée le 22 avril 2024, après 274 jours passés en détention. La figure de l’opposition Tofig Yagublu se trouve en détention provisoire depuis le 15 décembre 2023. Il est accusé de faux et usage de faux. Il ne s’agit pourtant que de trois exemples parmi une longue liste.
… les rois du pétrole
Comme Dubaï l’année dernière, l’Azerbaïdjan est un pays du pétrole et du gaz ; les deux énergies les plus polluantes sur la planète. Ilham Aliyev, son président, estime que ces gisements sont un “cadeau de Dieu”. Depuis trente ans, le pays a produit plus d’un milliard de tonnes de pétrole. Il prévoit également d’augmenter de plus d’un tiers sa production annuelle de gaz naturel. Les énergies fossiles représentent 90 % des revenus de ses exportations et entre 30 et 50 % de son Produit intérieur brut (PIB). Autre souci cette année, le président de la conférence internationale aurait des intérêts avec le monde de l’industrie fossile.
Mais alors pourquoi ce choix ?
Malgré ce constat acerbe, c’est bien l’Azerbaïdjan qui a été désigné en tant que pays hôte de la COP 29. L’organisation des COP est tournante. Chaque année, ces événements se déplacent dans une région du monde différente. L’ordre est prédéfini par l’ONU, dont dépendent ces événements. Les Nations unies ont découpé le monde en cinq groupes de pays : Afrique, Asie pacifique, Amérique latine et Caraïbes, Europe occidentale et autres, et enfin Europe orientale. Ensuite, les volontaires au sein de la zone se signalent et les pays élisent leur candidat final. C’est à la CCNUCC, l’agence des Nations unies qui organise les COP chaque année de valider. L’an dernier, l’Asie avait choisi Dubaï, cette année, l’Europe de l’Est a choisi l’Azerbaïdjan. La raison est donc fondamentalement géographique et les pays sont tenus de la respecter.
Appel à un boycott massif
C’est inédit depuis 2015. « Aucun dirigeant français ne participera au segment de haut niveau, c’est la première fois depuis l’accord de Paris » a déclaré la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, au Sénat, mercredi 6 novembre. Le président de la République, Emmanuel Macron, ne participera donc pas à la COP 29 à Bakou. Cette absence n’est pourtant pas isolée. Le chancelier allemand Olaf Scholz et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, ne seront pas présents non plus.
L’organisation de ce sommet par l’Azerbaïdjan est également dénoncée par de nombreuses personnalités politiques françaises. Ils ont appelé « le gouvernement à soutenir une action forte et symbolique pour le boycott de la COP 29 », dans une tribune publiée dans Le Figaro, jeudi. C’est le cas notamment d’Anne Hidalgo (PS), de Laurent Wauquiez (LR) ou de Yannick Jadot (Écologistes).
La France participera tout de même aux négociations. Agnès Pannier-Runacher a affirmé refuser de pratiquer la “politique de la chaise vide”. Elle rendra sur place du 21 au 24 novembre pour la phase finale de la négociation.