D’alliés discrets à l’animosité
À la naissance d’Israël en 1948, l’Iran se distingue : il est le deuxième pays musulman à reconnaître l’État hébreu en 1950, officialisant cette reconnaissance en 1960. Cette alliance s’inscrit dans la volonté d’Israël de nouer des liens avec des puissances non arabes pour briser son isolement au Moyen-Orient. Les deux pays coopèrent étroitement : Israël bénéficie du pétrole iranien, tandis que l’Iran profite du savoir-faire militaire israélien. Des projets conjoints voient le jour, comme le développement de missiles balistiques (Projet Fleur, 1977-1979). Les échanges commerciaux et militaires sont nombreux : El Al, la compagnie aérienne israélienne, assure des vols directs Tel Aviv-Téhéran et des entreprises israéliennes opèrent en Iran.
Mais cette alliance reste fragile. Si l’Iran y voit un moyen de contrer ses rivaux arabes, l’opposition religieuse iranienne dénonce la proximité avec Israël, alimentant un ressentiment qui s’exprimera violemment après la révolution. Déjà en 1975, l’Iran vote à l’ONU une résolution assimilant le sionisme au racisme, signe de tensions croissantes.
La rupture révolutionnaire : l’Iran change de camp
La révolution islamique de 1979 marque un tournant radical. L’ayatollah Khomeini, un des titres les plus élevés décerné à un membre du clergé chiite, renverse le Shah, l’empereur d’Iran. Il fait de l’antisionisme un pilier de la nouvelle République islamique. L’Iran coupe toute relation officielle avec Israël, interdit les passeports israéliens et bannit ses citoyens de tout voyage en Israël. L’Iran commence à soutenir activement la cause palestinienne et les mouvements armés opposés à Israël. Khomeini fait de la lutte contre Israël un élément de légitimation du régime, aussi bien sur la scène régionale qu’auprès de la population iranienne.
Privé de relations officielles, le conflit s’exprime désormais par groupes interposés. L’Iran soutient la création du Hezbollah au Liban en 1982, qui deviendra le principal adversaire d’Israël. Ce soutien s’étend au Hamas à Gaza et à d’autres milices chiites dans la région. Les années 1990 sont marquées par des attentats contre des intérêts israéliens et juifs à l’étranger, attribués à l’Iran et à ses alliés.
Parallèlement, la question nucléaire émerge : Israël s’inquiète des ambitions atomiques iraniennes, tandis que l’Iran cherche à renforcer son influence régionale face à l’isolement imposé par les États-Unis et Israël.
Le nucléaire : un nouvel enjeu capital
À partir des années 2000, le dossier nucléaire devient central. Israël considère qu’un Iran doté de l’arme atomique représenterait une grande menace. Les opérations clandestines se multiplient : cyberattaques, assassinats de scientifiques nucléaires ou encore frappes ciblées contre des positions iraniennes en Syrie. L’Iran, de son côté, renforce ses capacités balistiques et développe un réseau d’alliés régionaux pour harceler Israël sur plusieurs fronts.
La guerre de Gaza en 2023 marque une nouvelle étape : l’Iran est accusé de soutenir activement le Hamas et le Hezbollah dans leurs attaques contre Israël. Pour la première fois, des frappes directes sont échangées : Israël vise des infrastructures stratégiques en Iran, qui riposte par des salves de missiles sur Tel Aviv et Haïfa. En juin 2025, la confrontation atteint un niveau inédit, avec des raids aériens israéliens sur Téhéran et des frappes massives iraniennes sur le territoire israélien. Alors que la confrontation directe s’intensifie, la stabilité régionale semble plus fragile que jamais, et chaque incident pourrait faire basculer la région dans un conflit généralisé.
