David Cameron, son comeback inattendu au sein du gouvernement britannique

Un important remaniement ministériel 

Le Premier ministre anglais Rishi Sunak, a remanié son gouvernement, entraînant le départ de Suella Braverman. La ministre de l’Intérieur était déjà sur la sellette, elle avait tenu de nombreux propos polémiques, comme le fait que vivre dehors était un “mode de vie choisi” par les sans-abri. Cette décision d’évincement s’est précipitée suite aux reproches qu’elle avait faits à la police britannique dans une tribune du célèbre journal The Time.  La ministre reprochait à celle-ci l’autorisation de la manifestation pro-palestinienne et les accusait d’être davantage tolérants avec les manifestants de gauche.

Ces propos ont été considérés comme mettant en doute les actions des forces de l’ordre, mais surtout elle ne respectait pas l’autorité de Rishi Sunak. Pour cause, l’article n’avait pas eu l’accord de publication du Downing Street. 

Le remaniement du Premier ministre n’est donc pas anodin, il est à la recherche d’un nouveau souffle pour redorer l’image des conservateurs, face à l’impopularité du parti qui est au pouvoir depuis 13 ans. Les élections législatives prévues d’ici janvier 2025, menacent le maintien du parti de Rishi Sunak. À ce jour, les sondages sont davantage en faveur d’un gouvernement travailliste qui s’est repositionné au centre de l’échiquier politique. 

Pourquoi David Cameron comme ministre des Affaires étrangères ? 

C’est la question que beaucoup se posent, et c’est aussi ce qui provoque ce choc chez les Britanniques, le journal The Guardian parle d’un “retour surprise de Cameron dans un remaniement aux enjeux élevés.” 

Pour mieux comprendre ce retour, CSactu a interrogé Catherine Mathieu, économiste à l’OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques) et spécialiste du Royaume-Uni. Si son retour est inattendu, c’est notamment car David Cameron a un passé politique important au Royaume-Uni. Ancien Premier ministre, il avait organisé le référendum sur la sortie du Royaume-Uni de l’Union Européenne à laquelle il s’opposait. Suite à la victoire du “Leave”, il a décidé de quitter le gouvernement en 2016. David Cameron revient donc six ans après en tant que ministre des Affaires étrangères. Il succède à James Cleverly qui devient ministre de l’Intérieur à la place de Suella Braverman. Selon Catherine Mathieu, ce retour est d’autant plus étonnant car Rishi Sunak évoquait vouloir du “changement” au sein du parti conservateur. 

Depuis son départ en 2016, David Cameron était très en retrait de la scène politique, explique Catherine Mathieu. Les actions de ces dernières années lui sont reprochées, notamment par la presse et certains membres du parti conservateur. L’ancien Premier ministre avait fait polémique à la suite de financements accordés à la société Greensill Capital, qui a fini en faillite en 2021. Il avait rejoint la société australienne en tant que conseiller spécial. Son ouverture sur la Chine lui est également reprochée, en particulier par les conservateurs qui se positionnent davantage contre. 

David Cameron représente bien les idées du parti conservateur, notamment en matière de politique économique. Il est aussi beaucoup plus modéré que Suella Braverman, ancienne ministre de l’Intérieur, limogée par Rishi Sunak. Le retour de David Cameron, qui représente les valeurs traditionnelles des conservateurs, apparaît dès lors comme un choix raisonnable pour Rishi Sunak. Le Premier ministre anglais cherche sûrement à améliorer les chances du parti conservateur pour les élections législatives et espère attirer des électeurs grâce au retour de David Cameron.  

Un choix surprenant ?

Catherine Mathieu évoque tout de même une importante prise de risque de la part de Rishi Sunak. Elle doute du fait qu’en tant qu’ancien chef d’État britannique, David Cameron se contente de jouer seulement le rôle de ministre des Affaires étrangères et qu’il souhaitera intervenir sur d’autres sujets. Catherine Mathieu explique, “l’usure du parti qui est au pouvoir depuis 13 ans, le retour de David Cameron montrent que Rishi Sunak n’a pas trouvé de personnalité avec une envergure suffisante au sein des conservateurs pour assurer le rôle de ministre des Affaires étrangères.” Le retour d’un ancien Premier ministre n’est pas très rassurant. 

David Cameron reconnaît lui-même que “c’est inhabituel, pour un ancien Premier ministre, de revenir ainsi.” Mais il s’affirme confiant pour son retour au gouvernement et assume son passé : 

“J’espère que mes six années en tant que Premier ministre et mes onze années à la tête du parti conservateur m’apporteront une expérience, des contacts, des connaissances utiles et que je pourrais aider le Premier ministre.” 

Catherine Mathieu se dit “surprise” du retour de David Cameron. Faire revenir à ce poste stratégique et très visible un ancien chef d’État, qui représente chez les conservateurs le vote du Brexit, est surprenant.