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Entrée de Missak Manouchian au Panthéon : retour sur une figure de la résistance

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Adrien POURAGEAUD

Étudiant en M2 Sciences Sociales à l'université Paris Cité | Rédacteur au sein de la rubrique politique
Le 18 juin 2023 a été annoncée la panthéonisation du résistant d’origine arménienne Missak Manouchian, aux côtés de son épouse Mélinée. Cet événement, qui aura lieu le 21 février, sera l’occasion de rendre hommage à toutes les personnes d’origine étrangère, engagées dans la résistance.

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Le Panthéon au coeur du Quartier Latin à Paris, Pexels
Le Panthéon au coeur du Quartier Latin à Paris, Pexels

Rescapé du génocide arménien

Missak Manouchian naît le 1ᵉʳ septembre 1906 au sein d’une famille arménienne, à Hısn-ı Mansur, une province de l’Empire ottoman. Ses parents figurent parmi les victimes du génocide arménien, qui a été perpétré par le pouvoir ottoman entre 1915 et 1923. Véritable rescapé du génocide, il est recueilli avec son frère par une famille kurde, avant d’arriver à Marseille à 18 ans, où il exerce le métier de menuisier, puis de tourneur aux usines Citroën de Paris. Grand amateur de littérature arménienne et française, il fonde une revue littéraire et demande, sans l’obtenir, sa naturalisation. Il adhère en 1934 au Parti communiste, puis rejoint la section française du Comité de secours de l’Arménie, organisation liée à l’Internationale communiste.

Dirigeant de la Résistance française

La déclaration de guerre en 1939 conduit à l’arrestation et à l’emprisonnement de Missak Manouchian, du fait de son statut d’apatride et son engagement au sein du Parti communiste (qui est dissous dans la foulée).

Après une seconde arrestation par des officiers allemands, il est libéré puis devient membre de la Main-d’œuvre immigrée (MOI), une structure de résistants étrangers créée par le Parti communiste. Il devient ensuite responsable politique de la section arménienne, puis intègre l’organisation clandestine Francs-Tireurs et partisans-Main d’œuvre immigrée, qui est à ce moment la seule structure résistante à lutter de façon armée contre l’Occupation à Paris.

Interné à la prison de Fresnes et condamné à mort, il est fusillé au Mont-Valérien le 21 février 1944, en même temps que la plupart de ses camarades résistants. Un monument à la mémoire des résistants et otages fusillés a été édifié au fort du Mont-Valérien en 1997, suite à une loi poussée par l’initiative de Robert Badinter.

Une mémoire toujours omniprésente

Les services allemands vont, suite à l’exécution de Missak Manouchian et de ses camarades résistants, placarder le visage de 10 hommes sur une affiche : l’Affiche rouge. Cette affiche de propagande allemande, ouvertement xénophobe et antisémite, a été massivement diffusée en France occupée, afin de décrédibiliser l’action des résistants étrangers. Contrairement à l’effet attendu par l’office de propagande nazie, l’Affiche rouge est rapidement devenue un puissant symbole de l’héroïsme et du courage de la résistance.

La mémoire de Missak Manouchian a été portée par de très nombreux artistes et intellectuels. En 1950, le résistant communiste Paul Éluard publie, dans son recueil Hommages, le poème Légion, qui traite des liens des résistants étrangers avec la France. Cinq ans plus tard, un autre résistant communiste, Louis Aragon, écrit Strophes pour se souvenir, inspiré de la dernière lettre écrite par Missak Manouchian à son épouse Mélinée. Sur ces strophes, le chanteur anarchiste Léo Ferré interprète et compose L’affiche rouge en 1961, ce qui contribuera grandement à populariser le poème d’Aragon.

Missak et Mélinée Manouchian seront donc le 4ᵉ couple à entrer au Panthéon, après Marcellin et Sophie Berthelot (1907), Pierre et Marie Curie (1995), et Antoine et Simone Veil (2018).

Comment fonctionne une Panthéonisation ?

Le Panthéon, qui était originellement une Église, devient en 1791, sous la Révolution française, un temple pour honorer la mémoire des “grands hommes” ayant marqué l’histoire de France, comme le stipule l’inscription “Aux grands hommes, la patrie reconnaissante”, inscrite sur le fronton du monument. Mais qui décide de l’entrée d’une personnalité du Panthéon ? 

Aucun texte officiel ne définit de critères d’entrée au Panthéon. À l’origine, le pouvoir de décision était conféré aux membres de l’Assemblée Constituante (mère de l’actuelle Assemblée Nationale). Napoléon 1ᵉʳ s’est ensuite emparé de ce pouvoir, avant que ce dernier ne repasse entre les mains des députés.  Depuis la mise en place de la Vᵉ République (1958), le Président est le seul décisionnaire, par la signature d’un simple décret. C’est donc lui qui annonce la panthéonisation, sauf en cas de refus de la famille de la personne concernée. Le fils de l’écrivain Albert Camus, dont la panthéonisation avait été annoncée en 2009, s’y était opposé, craignant une récupération politique de l’événement.

Sur les 300 places présentes dans la crypte du Panthéon, 81 sont à ce jour occupées, dont six par des femmes. Certaines personnalités panthéonisées ne sont par ailleurs pas présentes au Panthéon, comme Josephine Baker, dont le corps repose à Monaco.

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