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L’affaire Taha Bouhafs, une épine dans le pied de la jeune NUPES ?

Marie Amarger

Marie Amarger

Etudiante en prépa littéraire
Le journaliste et candidat aux législatives NUPES Taha Bouhafs est visé par des accusations de harcèlement sexuel et de viol. La gestion de l’affaire au sein du comité interne LFI suscite de vives critiques et la présence dans le parti de ce militant préalablement condamné pour injures raciales interroge.

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Taha Bouhafs aux côtés de Jean-Luc Mélenchon lors du 1er mai
Qui est Taha Bouhafs ?

Taha Bouhafs est un jeune journaliste et militant La France Insoumise, d’origine algérienne. Il arrête les études à l’âge de seize ans pour se lancer dans le combat politique. Son père est par ailleurs lui-même adjoint au maire d’Échirolles (Isère). Proche du comité « Justice pour Adama », le jeune activiste se fait connaître en participant au mouvement étudiant parisien de « La Commune de Tolbiac », où il est accusé d’avoir relayé de fausses informations concernant le décès d’un étudiant après une intervention des forces de l’ordre. Très actif sur Twitter, il est à l’origine de la vidéo virale d’Alexandre Benalla frappant des manifestants place de la Contrescarpe, qu’il réalise avec son portable. En juin 2017, il se présente sous la bannière LFI aux législatives dans la deuxième circonscription de l’Isère où il récolte 11,1 % des suffrages. Trois ans plus tard, il est recruté par Le Média, site d’actualité lancé par Sophia Chikirou, conseillère en communication de Jean-Luc Mélenchon. Il fait partie de la jeune génération de visages de l’Union Populaire. Visé à plusieurs reprises par des accusations d’injures racistes et antisémites, il est un personnage clivant bien que protégé au sein du mouvement par des figures de proue telles que le député Eric Coquerel. Il se targue alors d’être un représentant des quartiers populaires.

L’affaire de violences sexuelles

Le 7 mai 2022, LFI saisit son comité contre les violences sexuelles après avoir reçu un signalement d’une plaignante, ayant souhaité conserver l’anonymat. La députée et militante féministe Clémentine Autain, elle-même victime de viol étant plus jeune, déclare que « la cellule n’a jamais reçu un témoignage avec des faits d’une telle gravité ». Le 10 mai, Taha Bouhafs retire sa candidature aux législatives. En janvier 2022, le site Arrêt sur images s’attardait déjà sur des problèmes de traitement sexiste au sein de la rédaction du Média, une journaliste accusant le jeune militant de harcèlement à son encontre. Les faits de harcèlement sexuel étaient de plus connus de longue date de manière informelle au sein du réseau militant LFI, depuis la période « Commune de Tolbiac ».

Quel retentissement pour la NUPES ?

La jeune coalition de gauche organisée autour de Jean-Luc Mélenchon à l’approche des législatives essuie ici le douloureux prix de la médiatisation d’une affaire des plus gênantes. Lorsqu’il annonce se retirer, Taha Bouhafs évoque en effet d’abord dans un tweet une « tempête d’attaques sans précédent », et est soutenu par Jean-Luc Mélenchon qui déclare « Je m’en veux de ne pas avoir su le réconforter autant que nécessaire ». Clémentine Autain elle-même souligne « la violence des attaques venues de l’extrême droite » (…) contre un jeune homme sans diplôme, issu des quartiers populaires et de l’immigration ». Tout laisserait donc à penser que Taha Bouhafs s’est effacé en raison d’un acharnement raciste dont il aurait fait l’objet. Cependant, le lendemain, via des publications émanant de BFM et de Mediapart, le public découvre que cette démission serait plutôt liée à une enquête pour violences sexuelles le visant. Ces accusations sont par la suite relayées par Jean-Luc Mélenchon et par le mouvement. Un « revirement » vivement critiqué, notamment parmi les militants, qui sont nombreux à condamner un « manquement » de la part de La France Insoumise.

De plus, la gestion de l’affaire en comité interne suscite des critiques, certains évoquant l’article 40 du Code de procédure pénale, selon lequel « toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République ». Aux yeux de certains, l’affaire devrait donc être traitée par la justice et non simplement au sein du parti. Ainsi, l’avocate Isabelle Steyer, spécialiste des violences faites aux femmes, dénonce une « gestion en famille » de l’affaire : « On règle le problème à huis clos, avec des règles qui lui sont propres. Finalement, on zappe la procédure pénale et on fait perdre des chances aux victimes. En définitive, la justice – si tant est qu’elle soit saisie – recevra quelque chose de mâché, de reconstitué, de réécrit, de réinterprété à la sauce de l’institution. » Qualifiée de « pain béni » pour les opposants de la NUPES par les militants, l’affaire révèle selon certains une clémence accrue pour les figures issues de l’immigration, relativement rares au sein du parti. L’affaire Taha Bouhafs aurait été passée sous silence pour préserver cette figure symbolique des « quartiers ». La gestion de l’affaire et la présence même d’une figure montante accusée de viol dans ce parti de gauche ont suscité de vives critiques de bords divers. La polémique rejaillit également sur le Média, où était employé Bouhafs : « Il n’y a pas d’engagement féministe au Média. Cessez d’instrumentaliser cette cause et soyez dignes », déclare ainsi Maud Le Rest, pigiste pour le site.

Alors que certains évoquent à l’origine de cette affaire une lutte de succession au sein de la NUPES pour la circonscription destinée à Bouhafs, et où est désormais présenté le candidat Idir Boumertit, l’affaire très médiatisée fragilise la coalition à l’approche des législatives. Si Clémentine Autain a déclaré lors d’une interview sur BFM qu’aucun cadre n’était préalablement au courant de ces accusations, cette parole peut être remise en question par le fait que de nombreux militants en avaient pris connaissance des mois avant que n’éclose finalement le scandale.

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