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Rentrée parlementaire : Fin de la trêve pour la guerre des clans

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Octobre 2022, la rentrée parlementaire en France fait grand bruit. Les affaires judiciaires de différents députés, de partisans et même de ministres en fonctions sont venues s’inviter aux échanges houleux de l’Assemblée cette semaine. Les invectives sont nombreuses, les députés brassent de l’air, les débats sont à l’arrêt.

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28 juin 2022, Yael Braun-Pivet du parti Renaissance (anciennement LREM) et la Coalition Ensemble !, s’exprime après avoir été élu Président de l’Assemblée nationale à Paris (Photo de Christophe ARCHAMBAULT / AFP)
28 juin 2022, Yael Braun-Pivet du parti Renaissance (anciennement LREM) et la Coalition Ensemble !, s’exprime après avoir été élu Président de l’Assemblée nationale à Paris (Photo de Christophe ARCHAMBAULT / AFP)

La gauche en tremblement

Depuis plusieurs semaines, le débat public en France se concentre sur des affaires d’ordre privées de deux députés de la France Insoumise (FI) et de Europe Écologie-Les Verts (EELV). En effet, Adrien Quatennens a reconnu le 18 septembre, par un texte publié sur Twitter, avoir « giflé » sa femme avec laquelle est engagée une procédure de divorce. Le 3 octobre, BFMTV a apporté sa contribution au sujet, en informant que la femme du député a déposé une plainte à son encontre. Parallèlement, Julien Bayou, a démissionné de son poste de secrétaire national d’EELV, le 26 septembre, pour une affaire de violence psychologique sur une ex-compagne, dont les détails restent plus obscurs. Au-delà de la vie privée et des mœurs des députés au centre d’un battage médiatique de grande ampleur, ces deux affaires ont mis la gauche en ébullition. Ces deux partis qui se prétendent défenseurs des droits des femmes, sont ébranlés par cette image qu’ils renvoient et qui est contraire à leur combat.

A cette tempête médiatique qui s’abat sur les deux partis, une autre s’ajoute, le délitement progressif de la Nouvelle Union Populaire Écologique et Sociale (NUPES). Concernant les deux députés, les mots les plus durs viennent de leur propre camp, avec par exemples les déclarations de Sandrine Rousseau sur ces sujets. Elle en appelle quasiment à la démission de ses deux collègues, Adrien Quatennens devant se « retirer de la parole publique » et Julien Bayou ayant été encouragé dans son choix de démissionner de son poste de secrétaire national du parti. C’est ici la moindre des frictions internes à la NUPES ! Plus récemment encore, le 6 octobre, Jean-Luc Mélenchon a élaboré une comparaison historique dans un tweet détonant, ramenant ses militants, pour la « marche » du 16 octobre qui vient, au contexte politique d’il y a 233 ans : « Le 5 et le 6 octobre 1789 les femmes marchent sur Versailles contre la vie chère. Elles ramènent le roi la reine et le dauphin de force à Paris sous contrôle populaire. Faites mieux le 16 octobre. ». Si les réactions ont été acerbes du coté présidentiel, elle le furent tout autant dans la bouche de cadres de la gauche, en particulier d’Olivier Faure, premier secrétaire du Parti Socialiste (PS).

Si cette rentrée parlementaire fait le plaisir des médias, elle ne le fait pas pour la gauche qui se prétend unie à l’Assemblée Nationale.

La majorité présidentielle, Renaissance des conflits.

Pour la majorité présidentielle, les affaires reprennent également. Alexis Kohler, l’éminence grise du gouvernement, et Eric Dupont-Moretti, ministre de la Justice lui-même, n’ont pas échappés non plus à des procédures judiciaires. Le premier pour « prise illégale d’intérêts », le deuxième pour avoir usé de son influence en tant que ministre pour des affaires judiciaires qui le concernaient en tant qu’avocat. Là encore, il ne nous revient pas de définir s’ils sont coupables ou non, seulement d’en tirer des conséquences sur la vie politique française. Ces deux affaires ne confortent évidemment pas la position du gouvernement, déjà mis à mal par une Assemblée qui n’a pas de majorité absolue en sa faveur. Elisabeth Borne, à la tête du gouvernement, le sait fort bien. C’est pourquoi lors de la première assemblée plénière de la semaine et de cette période de rentrée, elle a usé du droit constitutionnel (article 50-1) du Premier Ministre pour faire une déclaration à la tribune de l’Assemblée sur le sujet de son choix. Ce fût l’Ukraine. Quoi de moins étonnant ? Emmanuel Macron a utilisé ce même sujet pour se faire réélire. La prise de risque sur un pareil sujet, c’est-à-dire de se voir ballotter par des débats houleux, est quasi-nulle. « Nous n’avons pas le droit de faiblir […] Nous devons être solidaires » a-t-elle affirmée, ou encore : la guerre en Ukraine « n’est pas seulement un conflit entre deux pays. […] Cette guerre, c’est une lutte pour nos valeurs ». Tout cela est bel et bon, mais sur le plan symbolique, pourquoi axer la première prise de parole du chef de gouvernement sur la politique étrangère, à l’heure où l’inflation et le prix de l’énergie augmentent, et que le niveau de vie baisse ? C’est probablement la peur. En essayant de ménager les députés qui lui sont opposés, le gouvernement fait acte de faiblesse. C’est essayer de réunir sans s’attarder aux sujets de fond. Car si les positions du gouvernement et du Président de la République sont très clairs quant à la guerre en Ukraine, c’est beaucoup moins le cas concernant les problèmes sociaux et sociétaux en France.

Après cette première journée de rentrée parlementaire, axée sur la défense, c’est encore le parti présidentiel qui a pris l’initiative, par le biais d’Aurore Bergé, mais cette fois-ci, par l’attaque. En effet lors de la séance ordinaire du mardi, où des Questions au Gouvernement sont posées, la présidente du groupe Renaissance a désigné sans les nommés, lors d’une question sur les violences conjugales, Adrien Quatennens dont nous avons parlé plus haut et LFI son parti. Esclandre à gauche, applaudissement au centre et à droite. Danièle Obono est même rappelée à l’ordre par la présidence de la séance. L’attaque a eu son effet, les sièges les plus à gauche de l’Assemblée sont déstabilisés et discrédités pour toute attaque qu’ils souhaiteraient eux même porter.

Quelles conclusions après cette première semaine de reprise parlementaire ?

Les eaux parlementaires, visibles à l’horizon de cette rentrée, sont bien sombres pour le bateau de l’Assemblée. Tous les partis s’écharpent, et en leur composition même. Tous sont à couteaux tirés, le tout pour gagner quelques points sanglants dans l’opinion publique. Si les partis du Rassemblement National (RN) et Les Républicains (LR) ne concentrent momentanément en rien l’attention générale, leurs députés ont largement pris la parole pour participer à ces débats intempestifs.

Cette remise en route de l’organe législatif en France pose question sur la représentativité des députés et du gouvernement vis-à-vis des Français. La légitimité de certains d’entre eux pour siéger en cette assemblée semblent ébranlée par des affaires judiciaires. D’autres parts, et cela semble de loin le plus important, alors que les députés s’entre-déchirent et que le gouvernement s’échoue sur des rivages de banalités, la situation des Français reste, quant à elle, inchangée. Dans cette désunion nationale qu’incarne l’Assemblée, existe-t-il une sortie vers le haut ? Si la situation perdure, si les partis continuent à cristalliser les oppositions plutôt qu’à trouver des compromis, ce sera la paralysie du pouvoir législatif, et l’arrivée d’une période bien sombre pour la République française, pour la démocratie dans notre pays. La démocratie en France est affaire de ressemblances, pas de différences.

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