En 26 mois, Gustave Eiffel a construit la Tour Eiffel. En 1h48, Martin Bourboulon retrace cette épopée historique. Eiffel est un film historique et romantique sorti le mercredi 13 octobre en France. On y retrouve des acteurs comme Romain Duris ou Emma Mackey, rendue célèbre par son interprétation de Maeve dans la série Netflix Sex Education.
Eiffel, un biopic original
Gustave Eiffel est au sommet de sa carrière après avoir achevé sa collaboration avec Bartholdi pour la réalisation de la Statue de la liberté. Le gouvernement veut qu’il produise un projet d’envergure pour l’Exposition Universelle de 1889 se tenant à Paris. Mais Eiffel ne s’intéresse qu’au métro, et refuse d’accomplir le projet de construction de la plus grande tour au monde (et considère que l’âge de fer est désormais achevé). Il recroise soudainement son amour de jeunesse, Adrienne Bourgès, et en est inspiré pour construire la Tour éponyme. Entre romance et histoire, ce film nous conduit à retracer l’histoire de la Tour Eiffel, et surtout de la liaison entre Adrienne et Gustave.
Si Eiffel a été largement salué par la critique et le public, en témoigne son succès en salle, son étiquette de film historique interroge.
Entre film historique et réécriture romantique
Gustave Eiffel et Adrienne Bourgès ont véritablement entretenu une liaison. Les deux personnages se rencontrent lors de la construction du pont de Bordeaux en 1860. Adrienne est alors la fille d’un riche négociant en bois. Leur rencontre mène à la passion puisque dans une de ses lettres adressées à sa mère, l’ingénieur prétend vouloir l’épouser. Cependant, la classe sociale qui divise les deux amants les sépare. Le père d’Adrienne Bourgès se serait opposé au mariage en découvrant que la mère de Gustave Eiffel n’était qu’une négociante en charbon. Peut être se sont ils recroisés par la suite, comme le relate Le Parisien, puisque le fils de Gustave Eiffel, Edouard, épouse en 1897 la nièce d’Adrienne, Marie-Louise Bourgès.
Mais si le film montre une part véritable de l’histoire de Gustave Eiffel, il s’agit avant tout d’une version romantisée de cette dernière, mêlant un prétendu amour de jeunesse à l’histoire de la Tour Eiffel. C’est ce que souligne Thérèse Dubuisson, membre du bureau de l’association « Eiffel né à Dijon ». « Le problème, c’est que cette histoire est totalement inventée : ce n’est pas un « amour de jeunesse », Adrienne Bourgès, une femme qu’il a connue parmi d’autres, qui a convaincu Eiffel de faire la tour… C’est un peu comme si je vous disais que le général De Gaulle avait courtisé Marilyn Monroe. »
Eiffel : un portrait incomplet de l’ingénieur…
Cette reconstitution imparfaite divise même les descendants de l’ingénieur français. Si Myriam Larnaudie-Eiffel, arrière-arrière-petite-fille de Gustave Eiffel, juge le film positivement, ce n’est pas le cas de Philippe Coupérie-Eiffel, un autre arrière-arrière-petit-enfant. Ce dernier considère que la production du film délivre un portrait incomplet et faussé du personnage et de sa construction. Philippe Coupérie-Eiffel regrette notamment que le film se réduise à une « banale histoire d’amourette », et écrit dans les colonnes du journal Sud-Ouest « Le public méritait mieux, au moins la vérité ».
Un film historique, peut-être, mais un documentaire certainement pas. Eiffel est donc une histoire à ne certainement pas voir comme une reproduction fidèle de l’histoire qui noue Gustave Eiffel, Adrienne Bourgès et la Tour Eiffel. Trois personnages étroitement liés à l’écran, mais pas aussi fidèlement dans les faits. C’est ce qui a valu au film de Martin Bourboulon quelques sévères critiques historiques.
… et un casting qui agace
Quand la fiction se heurte à la réalité, les polémiques sont donc inévitables. Le choix du casting, s’il peut séduire par le talent des acteurs proposés à l’affiche, fait lui-même parler. En particulier celui du couple phare à l’écran, interprété par Romain Duris et Emma Mackey. Entre les deux acteurs, 22 ans d’écart, quand seulement 9 années séparent leurs personnages. Un choix qui agace, en particulier dans une ère post-#Metoo. Les actrices de plus de 40 ans seraient elles en voie de disparition ? C’est ce que semblent laisser supposer des films tels que Eiffel, ou, à plus petite échelle, James Bond où Daniel Craig et Léa Seydoux ont 17 ans d’écart. Pourtant, les actrices soulignent la difficulté d’obtenir des rôles à ces âges-ci, comme si une date de péremption venait affecter systématiquement les femmes, épargnant leurs homologues masculins.
Un succès prometteur
Entre critiques historiques et polémique féministe, Eiffel parvient toutefois à conserver sa position de tête dans le box-office français depuis sa sortie. Plus de 1610 personnes se sont ainsi rendues le matin même de la sortie du film en salle, une prouesse que salue le journal Numéro, soulignant le contexte pandémique de sa sortie.
Eiffel, un film à voir avec du recul, disponible sur le grand écran depuis le 13 octobre.
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